EN PRATIQUE
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RAPPORT DE LEXERCICE DE CAPITALISATION
DU PROJET PROMOTION DE LA PARTICIPATION DES FEMMES
A LA GOUVERNANCE LOCALE AU BURKINA FASO
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Franoise Bibiane Yoda * Introduction Au Burkina Faso, malgr lexistence dinstruments juridiques posant le principe dgalit des droits pour tous les citoyens sans distinction de sexe, les hommes et les femmes ne jouissent pas encore des mêmes priviléges quant à leur participation à la vie publique et à la gouvernance locale. Lanne 2006 a consacr la communalisation intgrale du pays, ce qui a permis llection de 6400 femmes au poste de conseilléres municipales contre 11477 lus chez les hommes. La socit civile sest fortement investie dans les projets de promotion dune meilleure participation des femmes à ces consultations lectorales. Le Rseau Femmes en Action (RFA) a mis en oeuvre en 2005 le projet de promotion de la participation des femmes à la gouvernance locale au Burkina Faso (PPFGL-BF). Ce projet a eu comme objectifs de susciter lveil politique et une prise de conscience des femmes pour amliorer leur position dans les consultations lectorales et lever le niveau de leurs capacits civiques en vue dune participation effective et efficiente au processus dmocratique. La mise en oeuvre du projet qui sest faite à travers une recherche-action a dur une anne et a permis datteindre les rsultats suivants: Aprés la mise en oeuvre du dit projet et aussi à la fin du mandat des conseillers, le Rseau a souhait faire une capitalisation du projet dans le but den tirer des leons visant à les amliorer, mais galement à inspirer dautres acteurs de dveloppement qui voudraient travailler sur la thmatique femme et gouvernance locale . Cette capitalisation sest faite à travers une documentation de lexprience du projet (collecte de donnes à travers des interviews des acteurs et actrices du projet à la base, traitement et analyse des informations, montage et mixage de support audio en cassette et CD ROM/DVD). A travers cet exercice de capitalisation, le Rseau a essay de faire ressortir la plus-value du projet dans la participation des femmes à la gouvernance locale. Les diffrents acteurs et actrices ont eu la possibilit de sexprimer, chacun en fonction de son contexte et de ses ralits quotidiennes, ce qui a permis de vrifier les rsultats atteints et constituer une masse importante de recommandations et dactions pour la suite du processus marqu par des lections municipales en novembre 2012. La capitalisation a t galement ralise pour venir en appui aux radios locales partenaires en les dotant de cassettes et CD ROM pour la radiodiffusion.
Pour la ralisation de la prsente mission, le Rseau sest entour des comptences dune experte en genre et gouvernance appuye par un communicateur. Les acteurs contacts sont le staff du RFA (initiateur du projet), les acteurs à la base notamment les femmes conseilléres et Maires des communes urbaines et rurales, les leaders dopinions, le pool de comptences au niveau local[1]. Il faut souligner galement que le Rseau est dans un processus continu de concertation avec les autres organisations de la socit civile pour harmoniser leurs interventions pour plus defficacit sur le terrain. Cest ainsi que plusieurs rencontres de concertation ont t organises pour dfinir ensemble une stratgie commune dintervention et une rpartition des zones dintervention. Au cours de la capitalisation, les consultants se sont donc tout naturellement intresss à cette dynamique des organisations car juge importante en terme de renforcement du processus pour les annes à venir. La collecte, le traitement et lanalyse des donnes a permis dlaborer un support audio de 26 minutes en cassettes audio et CD ROM. Elle a galement permis dlaborer le prsent rapport de capitalisation qui prsente les acquis du projet, les difficults internes et externes, ainsi que des recommandations visant à dynamiser la participation des femmes à la gestion des collectivits locales au Burkina Faso.
Le contexte Situation socio-conomique Situation politique Au niveau de la gestion du pouvoir dEtat, dune maniére gnrale, les femmes ont toujours t sous-reprsentes dans les institutions nationales et locales depuis lindpendance du pays. Le nombre de femmes dans chaque gouvernement na jamais dpass cinq (05), et celles-ci ont gnralement occup les domaines qui renvoient à leur rle social (enseignement, action sociale, promotion fminine, etc.). Ainsi, par exemple, le gouvernement de juin 2007 na pas drog à la régle puisquil compte 5 femmes sur 34 ministres et ministres dlgus, soit un taux de 14,24 % de reprsentation fminine. Au niveau des postes lectifs, même si lon constate des amliorations, le progrés se fait toujours attendre. Durant la priode 1959-2002, les chiffres indiquent un total de 537 hommes contre 30 femmes qui ont sig au Parlement : ce qui reprsente seulement 5,29 % (1,4 % à la premiére lgislature, 9 % à la deuxiéme, 12 % à la troisiéme et 14 % à la quatriéme). Quant au pouvoir local, la reprsentation des femmes lues a progress à raison de 8,9 % en 1995, 20,8 % en 2000, et 35,80 % en 2006. Sur les 351 maires que compte actuellement le pays, 20 seulement sont des femmes. Bréve prsentation du Rseau Femmes en Action Le RFA a t cr en 2003 avec pour mission de contribuer à la rduction de la pauvret au Burkina Faso par laccompagnement des communauts de base (organises en associations, groupements agricoles, micro-entreprises rurales, coopratives, etc.) dans divers domaines visant leur autopromotion et leur pleine participation au processus de dveloppement à la base. Ses objectifs: Organisations partenaires de la plateforme de concertation pour une stratgie commune sur Femmes et Gouvernance Locale Partenaires techniques Les acquis du projet Au terme de cette capitalisation, les acquis suivants ont t relevs : Je suis conseillére à Nagrongo et jai travaill dans la commission de lenvironnement. Je me suis battue au sein de cette commission pour que les femmes actives dans la production de loignon sur la rive droite du barrage de Ziga aient des primétres pour le travail collectif en groupement et pour le travail individuel des femmes. Mme Asséta Congo En plus de ces acquis, il convient de souligner que le projet a suscit lveil de conscience des femmes et des hommes et plusieurs femmes ayant pris part au projet ont accept de sinscrire comme candidates sur les listes des partis politiques afin de briguer des postes lectoraux. Certaines dentre elles ont t lues conseilléres municipales et occupent actuellement des postes de premier adjoint au maire et de prsidente de commission au sein du conseil municipal. Le projet a permis le renforcement institutionnel et matriel du Rseau pour être encore plus outill en ressources humaines et matrielles pour plus defficacit sur le terrain. Les outils et mthodologies utiliss au cours du projet ont montr leur efficacit dans les zones du projet. Les difficults internes et externes rencontres En plus des acquis du niveau micro jusquau niveau macro, la capitalisation a relev un certain nombre de difficults lies à lenvironnement interne du projet mais aussi à lenvironnement externe. Au plan interne, il sagit de : Pour ce qui est du projet cest une bonne initiative parce quil a contribu à veiller nos consciences et renforcer nos connaissances mais en ralit la participation aux sessions du conseil municipal est difficile, par exemple si je dois quitter ma maison, aller sjourner 3 jours à Ouahigouya cest difficile. Les frais de sessions qui sont de 2000 Fcfa par jour ne me permettent pas de faire face aux besoins. En plus quand je mabsente, mon commerce est ferm, pourtant cest ma principale source de revenus. Je suis veuve avec 5 enfants qui vont à lcole. Si on me demande de rebelotter ma place de conseillére je ne my aventurerai plus jamais. Zenabo Kabor Je mappelle Ouedraogo Limata, je suis conseillére à la commune de Gounghin. nous sommes deux femmes à siger au conseil municipal. Les documents des sessions nous parviennent tard. En plus je suis analphabéte et il mest difficile de bien prparer la session. Aussi, si la session tombe le jour du march, je ne peux pas y aller car jai rendez-vous avec mes clients. Cest vraiment difficile. Cest mon frére agent technique dagriculture qui maidait à prparer les sessions et me traduisait en moor (langue locale) pour que je puisse comprendre les enjeux. Ce qui me permettait de participer activement aux discussions. Cest lui qui lisait les documents. Le fait de navoir pas fait lcole est un grand handicap pour ma participation active aux sessions du conseil. Ouedraogo Limata Concernant les difficults externes, elles sont surtout lies : - Au dmarrage tardif de la capitalisation (non disponibilit des acteurs pendant les vacances dAoût et les travaux champêtres) ; Raccomandations Pour accompagner le Rseau et les autres acteurs dans la mise en oevre dactions de renforcement de la participation politique des femmes, les recommandations suivantes ont t formules : Recommandations à lendroit du Rseau : Pour russir cette nouvelle mission, le Rseau a besoin du soutien des autres partenaires, notamment les autorits politiques du pays, les organisations internationales et interafricaines, les organisations de la socit civiles du Burkina Faso, les responsables des partis politiques, les leaders dopinion et les femmes à la base. A cet effet, les recommandations suivantes leurs sont formules :
Conclusion Au terme de cette exprience de capitalisation de projet de promotion de la participation des femmes à la gouvernance locale au Burkina, des acquis ont t relevs sur le plan quantitatif et qualitatif. Des difficults ont galement t releves aux diffrents niveaux. Les recommandations ainsi formules permettront sans doute de relever ces difficults mais surtout de dynamiser la participation des femmes lors des consultations lectorales à venir. Lenvironnement politique et juridique du pays a connu des avances avec ladoption dinstruments favorables aux femmes. Cette somme dexpriences contribuera non seulement à amliorer les approches de travail, notamment la recherche-action participative, mais aussi renforcera la production de connaissances sur la gouvernance locale qui seront diffuses à la base à travers des canaux adapts (radios). Le dfi actuel est de russir lapplication effective de ces instruments à la base en faveur des hommes et des femmes. Cela requiert limplication et lengagement de tous les acteurs et actrices du dveloppement. Les femmes qui sont longtemps restes en marge du processus de dveloppement, notamment dans la gestion des affaires locales doivent maintenant participer à travers un leadership confirm à tous les processus. Le Rseau est toujours engag à poursuivre sa mission dappui aux femmes et compte aussi sur le soutien de ses partenaires. |
* Franoise Bibiane Yoda est directrice excutive du Rseau Femmes en Action, Ouagadougou, Burkina Faso. 1. Femmes formatrices charges de la formation au niveau local. 2. Leaders traditionnels. 3. Franc de la Communaut Financiére Africane (1 Euro = 655,957 F CFA). |
Universitas Forum, Vol. 3, No. 1, february 2012
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